Une cabane sous le Puy de Sancy

Après avoir failli louper mon covoiturage, le conducteur me confondant avec quelqu’un d’autre qui lui a donné un autre point de rendez-vous, quelques heures de route, la nouvelle que le logement prévu pour le lendemain est complet, me voilà après une première demi-heure de marche devant mon premier puy! J’en ai bien vu des photos, mais en vrai ça rend bien mieux: le volcan a un grand diamètre, avec les gens tout petits au fond du cratère on s’en rend bien compte.

Puy de Pariou

La suite me mène au très touristique Puy de Dôme, flanqué d’une antenne et d’une poignée de bâtiments. La montée se fait d’abord sur un escalier de bois pour protéger la flore, puis sur du goudron. Inutile de dire que faire 300km en voiture pour grimper 300m de denivelé sur de l’asphalte, ça fait pas rêver. À part l’air frais et le vent saisissant, le fun fact qui récompense quand même bien l’ascension est que l’on a retrouvé au sommet des ruines antiques d’un temple. Et bien sûr, c’est ce pourquoi je suis là, on a une charmante vue de la chaîne des Puys, rangés proprement les uns derrière les autres pour la photo, jusqu’à perte de vue.

Puys

La section entre le Puy de Dôme et le col de la Croix-Morand est plutôt plat, et essentiellement composée de pistes et routes. Il faut sortir du GR pour profiter des Puys, le chemin ne fait que serpenter entre eux. On m’a recommandé à plusieurs reprises le Puy de la Vache que j’ai raté. Le Puy de Vichatel est sympa à voir. Après Pessade, la forêt d’épicéas et les landes “vert Irlande” d’herbes rases annoncent le début de la montagne. Des cabanes de pierre ponctuent harmonieusement certaines étendues, offrant un refuge au milieu de ce paradis. Un troupeau de brebis mené par quelques bergers et le patou apparaissent derrière moi. Je les verrai presque toute la journée sur un sentier parallèle.

Abandoned house

Je m’arrête au buron du col de la Croix-Morand, à 1401m, pour une gaufre recouverte d’une bonne couche de confiture de myrtille. Le café allongé réchauffe bien après les premiers coups de vent froid. Vu la fraîcheur du vent mi-juillet, ce buron doit être un refuge salutaire après le raquettes ou le ski de fond en hiver. Là commence l’ascension. Les 7 premiers kilomètres de la journée étaient pour s’échauffer. Du haut du premier puy, le Puy de la Tache, j’aperçois de nouveau le troupeau de brebis en-dessous de moi, gravir la pente en face. C’est marrant de les suivre de loin, de les contempler tout petits qui avancent comme des legos que l’on manipulerait. La vue sur les alentours est spectaculaire. Les montagnes sont peu abruptes, tapissées d’une couverture vert Irlande, on croirait que le jardinier vient entretenir la pelouse tous les matins.

Puy de la Tache Cattle climbing the volcano - La chaîne des Puys

Je continue le long de la crête des puys jusqu’à laisser les brebis dans leur champ au pied du Puy de l’Angle. La prochaine ascension est celle du Roc de Cuzeau qui mène à la crête du Sancy. En haut, la vue sur les crêtes entourant la station du Mont Dore est superbe. On peut voir les petits points de tous les randonneurs qui longent ces crêtes. En face, le Sancy qui dépasse tous les autres. Et une fois arrivé au sommet, extrêmement venteux, on se rend compte de l’amas de touristes qui s’y concentrent, qui ont grimpé avec le télécabine. J’y reste tout juste pour apprécier l’ensemble des alentours, les crêtes derrière moi, les quelques puys que je ne gravirai pas et le Puy Gros, qui domine le paysage dans la direction que je prends. Et le long du GR, je me retrouve entre ces deux puys devant une pente pelousée qui donne envie d’avoir un parapente et de s’envoler. La pente est vallonnée, a une végétation d’un vert intense, parfaite pour apprécier un vol juste au-dessus.

La chaîne des Puys

Je grimpe le Puy Gros, le dernier de l’aventure. Encore une vue à couper le souffle, et un vent à s’envoler. J’ai quitté la foule autour du Sancy, je suis quasiment seul sur mon petit sommet. Je redescends à travers les pâturages, évitant de me retrouver trop près des vaches, dont certaines me suivent, pour atteindre mon buron pour la nuit. Un peu fatigué, je traîne mais arrive le premier de la soirée à cet abri non gardé mais très bien entretenu (y a même des dosettes de café et des sachets de thé). Je profite de ce milieu de nulle part, petit enclos humain au centre des prés de vaches, avec le soleil rasant les illuminant d’un côté, les puys de l’autre, avec quelques troupeaux broutant les pentes. Dans le silence, j’entends le tintement des cloches des vaches et même le bruit des vaches arrachant des touffes d’herbe du sol.

Buron du Merdençon et Puy Gros

Une heure après, à peine ai-je eu le temps de m’installer que 4 clermontois arrivent, prêts pour passer la nuit autour du feu. Après l’apéro devant le feu de camp qui prend vite, 3 autres clermontois, les sacs chargés de trop de bouffe et de bières, nous rejoignent. Les clermontois font cuire leurs saucisses sur le feu qui ne faiblit pas malgré le vent qui commence à se lever. Le reste de la soirée se passera à l’intérieur, le vent est trop fort pour rester dehors. Ce sera une belle soirée, cette fois les randonneurs sont aussi jeunes que moi, ça fait plaisir de passer la soirée avec eux. La lune ce soir est bien lumineuse dans le ciel clair, effaçant beaucoup d’étoiles du ciel. Mais on ne traîne pas devant le ciel étoilé dans ce vent froid.

La nuit commence avec le charme d’un film d’horreur. La porte, même calée avec un rocher, s’entrouvre et claque sans cesse. Le carreau cassé et réparé au scotch éclairé par la lune projette une forme sur le sol qui donne l’impression que quelqu’un est sur le point d’entrer. Le sifflement du léger courant d’air qui passe sous la porte et les rafales de vent qui agitent les murs ajoutent à l’ambiance. Seul, avec un bouquin morbidement approprié, je crois que je n’aurais pas dormi de la nuit.

Le matin est plus calme, le vent est toujours présent mais sans rafales. Je suis le premier levé, je dois rejoindre le village assez tôt pour attraper un covoiturage. Je traverse les champs d’élevage vallonnés, la lumière du soleil dans les yeux, les vaches qui me suivent et moi qui n’arrive pas à reconnaître le sentier. Je traîne, je me retourne souvent pour faire une pause à contempler la lande et le buron au milieu. J’ai quitté ce refuge ouvert à tous en espérant y revenir un jour, en faire mon refuge si je veux m’isoler du monde et y trouver une bonne ambiance, loin de la ville et de la civilisation.

Buron du merdençon Buron du merdençon

Je me retourne une dernière fois, puis retrouve le sentier du GR4 direction la civilisation. Je redescends à Super Besse, récupérer un pain au chocolat encore tiède avant d’atteindre le lac Pavin, lac aux eaux bleues où je me prélasse à l’ombre, avec un café, au milieu d’un puy, en attendant le chauffeur de mon covoiturage pour rentrer à Paris. C’est la fin de 4 jours au milieu des puys, de quelques rencontres autour d’une assiette de pâtes ou d’un feu, de superbes paysages, la chaîne des Puys les uns derrière les autres, la crête du Sancy, les pâturages sous le Puy Gros. Une belle évasion.